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Avant même que le terme de norme n'entre dans notre vocabulaire quotidien, l'histoire des arts a traditionnellement été pensée comme constituée de canons, de dogmes et de règles, définis par des théoriciens, des instances critiques et idéologiques, ou bien par les artistes eux-mêmes, unis au sein d'écoles, de groupes et de mouvements. Face à la norme, dont l'étymologie nous renvoie à l'équerre, aux lignes régulières, l'oeuvre hors norme se définirait donc comme dé-réglée, dé-mesurée, difforme, et même monstrueuse: en somme, para-normale, voire a-normale. À l'encontre de cette première définition péjorative de l'oeuvre hors norme, certaines approches auctoriales ont eu tendance à privilégier l'éloge de la transgression: la modernité esthétique passerait par la fréquentation des marges et par une sortie des règles communément admises. Mais ces postures de l'écart, face à des pratiques d'écriture en perpétuelle évolution, ne sont jamais précisément mesurables: elles évoluent dans des zones frontières, autour du champ littéraire, dont elles ne sont jamais totalement exclues. Grâce à une perspective doublement distanciée, tant chronologiquement (par la prise en compte d'une longue période, de la Renaissance à nos jours), que spatialement (en parcourant les littératures française, italienne, anglaise, polonaise, allemande), les articles de ce volume s'attachent à questionner les frontières mobiles et lâches qui séparent l'oeuvre normale de l'oeuvre hors norme: selon quel point de vue et avec quelle(s) visée(s) l'artiste essaie-t-il de s'affranchir des règles, de briser les lignes tracées par l'équerre? Suffit-il de se déclarer (ou d'être déclaré) hors norme pour l'être véritablement? L'oeuvre hors norme est-elle toujours et uniquement « résolument moderne »?