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La neutralité ne doit pas être considérée uniquement comme une abstention dans un conflit qui serait synonyme de repli sur soi dans une superbe indifférence face au tumulte de la guerre. Rester neutre peut être un véritable choix de politique étrangère extravertie permettant à une puissance d'assurer sa sécurité et de profiter d'un temps de conflit pour développer sa navigation et son commerce. Mais la neutralité a ses contraintes. Celui qui la choisit doit, d'abord, avoir la capacité de défendre son territoire et de faire respecter son pavillon face aux belligérants sous peine d'être victime d'une guerre à laquelle il demeure étranger. Il lui faut, ensuite, ne favoriser aucune des parties qui s'affrontent. Cette exigence est difficile à remplir, car elle impose de s'interroger sur les types de relations susceptibles d'aider un belligérant au détriment de l'autre, autrement dit, il faut définir l'activité et le moment qui font quitter au neutre l'impartialité à laquelle il doit s'astreindre. Ces préoccupations sont au cœur des politiques de neutralité du Danemark et de la Suède, dès la fin du XVIIe siècle, puis des Provinces Unies, au XVIIIe siècle, dans les conflits opposant la France à l'Angleterre. Pour le gouvernement de Versailles, les capacités des neutres à exporter les productions françaises, à assurer l'importation de marchandises étrangères et à prendre en charge le commerce avec les colonies sont des enjeux de plus en plus importants. La neutralité s'impose comme une question centrale dans le champ des relations internationales à la faveur du développement des échanges commerciaux et de la radicalisation des pratiques de guerre du XVIIIe siècle. Elle est une réalité complexe qui peut être étudiée par des approches emboitées, en la considérant du point de vue de différents acteurs: le diplomate qui la négocie, le négociant qui la pratique, le philosophe et le juriste qui la pense.