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<p>La pulsion, concept fondamental de la psychanalyse, doit-elle être conceptualisée en termes dualistes ou monistes? À partir d'un modèle conflictuel fondé sur deux principes premiers essentiellement irréductibles et antagonistes, Freud a toujours cherché à conceptualiser la pulsion en termes dualistes : pulsion d'autoconservation vs pulsion sexuelle partielle, libido de moi vs libido d'objet, pulsion de vie vs pulsion de mort. Interprétation biologique de la pulsion de mort, compulsion de répétition comme tendance restitutive, et dualisme pulsionnel ; ces choix théoriques sont en effet liés pour Freud.</p><p>Lacan, pour sa part, était porté par un "pousse-à-l'unarisme" ; à partir du modèle du ratage, de la topologie des surfaces et du mythe de la lamelle, son intuition fondamentale était que la pulsion doit être conceptualisée en termes monistes. Lacan parvient ainsi à injecter non seulement le plaisir, mais surtout la jouissance, cette satisfaction paradoxale qui fait souffrir, dans la structure fondamentale - dans le but - de la pulsion. Cette démarche implique que la pulsion de mort et le masochisme soient des aspects de chaque pulsion. Nous considérons ainsi la persistance du dualisme chez Freud, malgré ses évolutions, comme une résistance à une évidence moniste qui s'impose, et par ailleurs, comme son traitement.</p><p>Pendant un certain temps chez Lacan, le concept de pulsion sera pourtant éclipsé par le concept de répétition, répétition de jouissance en tant que plus-de-jouir. Or la pulsion moniste fait finalement un retour discret lorsque les questions du symptôme et du corps vivant qui se jouit sont mises en avant dans son dernier enseignement. Le monisme pulsionnel s'avère être une condition de possibilité pour le sinthome. À partir d'une revalorisation du versant de la pulsion de vie du point de vue de l'Un d'existence, le sinthome comporte une "homéostasie supérieure", c'est-à-dire une satisfaction qui inclut ce qui la dérange, une "répétition qui sauve". De plus, le sinthome en tant que pur événement de corps implique la généralisation d'une jouissance non-oedipienne, non-phallique, et par conséquent hors-savoir et hors-sens, qui ex-siste à l'être.</p>