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Contrairement à ce que l'on a tendance à croire aujourd'hui, la géométrie projective du 19e siècle — qu'elle soit synthétique ou analytique — ne mobilisait pas directement la notion d'espace projectif. L'utilisation de nouveaux outils et de nouvelles méthodes, ainsi que le renouvellement spectaculaire des modes de questionnement, contribuent certes à construire un cadre inédit mais celui-ci sera dégagé et désigné très tard. En tant qu'objet d'étude ou à titre d'exemple, l'espace projectif, et plus généralement les espaces géométriques, interviennent essentiellement dans des domaines excentrés par rapport à leur lieu de construction. Ainsi, l'expression « espace projectif » n'apparaît pas avant que le plan projectif ne devienne un exemple emblématique dans le contexte ouvert par l'étude des surfaces. De fait, la géométrie projective — qu'elle soit axiomatisée ou non — n'apparaît jamais comme l'étude de l'espace projectif mais comme un ensemble de méthodes plus ou moins formalisées, pour étudier des propriétés qui apparaissent dans un contexte général de recherche de généralité et de recomposition des pratiques des géomètres. Et c'est la mise en œuvre de ces méthodes qui fera émerger des propriétés inhabituelles entraînant la prise de conscience du changement du cadre même de la géométrie. Une notion comme celle d'espace géométrique semble donc susceptible d'une étude historique que l'on qualifiera de biographique, en ce sens que son installation dans le paysage mathématique apparaît comme résultant de l'émergence de méthodes, de pratiques ou de modes de questionnement qui ne sont ni centrés sur elle ni même concernés par son introduction.