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La tradition ancestrale du refuge montagnard en faveur des minorités opprimées, même chahutée, a résisté au totalitarisme du XXe siècle, que ce soit le refuge recherché par les Juifs eux-mêmes, comme Megève, ou le lieu de résidence imposé, comme Sallanches ou Saint-Gervais, par Vichy en 1942 ou par les Italiens en 1943. La montagne-refuge du Mont-Blanc bénéficie à tous les Juifs présents sur le site. Certes, le refuge, souvent précaire, n'est que temporaire. L'importance numérique, l'impact psychologique et la place historique de Saint-Gervais ont souvent été oubliés par les travaux de recherche. Ceux-ci en restent au seul centre de Megève, et ne perçoivent pas son remplacement progressif par le Val Montjoie à partir de mai 1943. L'organisation, l'esprit, l'ambiance de Saint-Gervais marquent tous ceux qui ont eu le privilège de passer dans cette vallée. C'est l'exemple à suivre, que les organisations juives cherchent à promouvoir pour les autres centres alpins. Simple goutte d'eau dans cet océan d'hostilité, diront certains ; refuge de très courte durée, simple répit de quelques mois, pour d'autres ; échec total, selon les plus pessimistes, puisqu'il n'a obtenu ni l'ouverture de la frontière suisse ni le transfert imaginé vers l'Afrique du Nord. Mais le séjour à Saint-Gervais permet aux réfugiés de cueillir des moments de bonheur, d'insouciance, de répit, que tous les survivants ont eu du mal à imaginer, et même à vivre, sans le sentiment d'une certaine culpabilité, tant cette insouciance du moment apparaissait comme irréelle. Qu'il est bon, pour ceux-là, ce bonheur de l'instant présent, ce " carpe diem " inattendu.