Prix public : 18,00 €
<p>Recru de souffrance physique et désespéré par la marche du siècle, Henry de Montherlant, le 21 septembre 1972, se tirait une balle dans la bouche après avoir absorbé - précaution supplémentaire - une ampoule de cyanure. Libre de toute éternité, le stoïcien romain venait de choisir la "sortie raisonnable". Le courage et la dignité de cette fin - qui n'allait pas sans similitude avec le <em>"seppuku"</em> du Japonais Mishima - furent unanimement salués.</p><p>Pourtant, l'oeuvre immense de l'écrivain allait connaître une désaffection grandissante. Moins le purgatoire inévitable qui suit la disparition d'un géant des lettres que la défiance de nouveaux publics plus portés à la suspicion qu'à admettre les libertés et l'authenticité d'une vie.</p><p>Il est vrai que Montherlant, de son vivant, ne se priva guère de cultiver l'équivoque et la provocation. Rappelons-nous ces formules frappées comme des médailles : <em>"Je vous reproche de ne pas respirer à la hauteur où je respire",</em> dit le vieux roi Ferrante à son fils, dans <em>La Reine morte.</em> Formules peu solubles, on en conviendra, dans le cocktail de compassionnel et de pensée unique qui caractérise notre époque.</p><p>Au point de faire oublier - syncrétisme et alternance - chez ce pessimiste altier, son "extase de la vie", sa proximité si délicate des humbles, sa solidarité maintes fois exprimée avec les peuples humiliés. Le visionnaire du <em>Treizième César</em> était-il coupable d'avoir annoncé la venue de temps infâmes et l'ère du Veau d'Or ?</p>