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Affirmons-le d'emblée, le genre n'est pas un concept éthéré, délié des contextes de son émergence ou de son importation. Il est ouvertement politique, pour le meilleur et quelque fois pour le pire. Conçu comme un outil d'analyse critique, il a dénaturalisé et révélé le caractère socialement construit de l'ordre traditionnel des sexes, ouvrant de nouvelles voies aux luttes des femmes. Le succès de la notion a néanmoins un prix, celui de sa reprise par des acteurs dominants, dont beaucoup l'ont réduite à un outil technocratique de gestion et plus encore, de contrôle social et de pouvoir. Le recours aux droits des femmes, devenu emblème de la modernité démocratique, a ainsi servi de caution morale à l'entreprise coloniale, aux guerres « humanitaires » et au racisme institutionnel. Il est un des discours légitimateurs de la mondialisation néolibérale. Les usages « impérialistes » du genre, tout comme son instrumentalisation pour masquer d'autres enjeux, ou encore sa politisation réactionnaire témoignent de l'ambiguïté de l'expression. Tantôt au service d'un «communautarisme majoritaire», tantôt d'une élite soucieuse de ses intérêts et privilèges. Pour inverser la tendance et rendre au genre sa force politique originale, des espaces de mobilisation se réinventent. L'«intersectionnalité» des luttes, en cherchant à aborder de manière égalitaire et imbriquée, critique et dynamique, les rapports sociaux de classe, de race et de sexe, offre de nouvelles perspectives et rend possible de nouvelles alliances.