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<p>La bulle paraît emblématique de la bande dessinée. Pourtant, depuis près de deux siècles, les auteurs expérimentent toutes sortes de procédés, pour rapporter les répliques de leurs personnages. À quoi voit-on que Blake et Mortimer ou Spirou et Fantasio dialoguent ? La dimension visuelle du média suffit souvent, même en l'absence de discours rapporté, à repérer une interaction verbale. Le dialogue caractérise aussi bien la bande dessinée muette que les histoires en images légendées.</p><p>Cet essai reconsidère la bande dessinée comme un média fondamentalement dialogal. Deux questions, intimement liées, sont envisagées. Comment analyser les interactions verbales dans un média visuel, en tenant compte de ses multiples dimensions : corps dessinés, répliques écrites, bulles, etc. ? La réponse privilégie l'étude d'un "âge d'or franco-belge", allant de la naissance du journal <em>Spirou</em> (1938) jusqu'à celle de <em>Pilote</em> (1959). Afin d'éviter de figer artificiellement un média artistique qui n'a jamais cessé de se redéfinir, la seconde question étend la période étudiée. Comment les formes du dialogue instituées par la "BD franco-belge" se sont-elles façonnées, du milieu du XIX<sup>e</sup> siècle au milieu du XX<sup>e</sup> siècle ? Comment la bulle, par exemple, est-elle devenue un emblème du média ? Quel impact le contact d'autres médias (sonores, visuels, audiovisuels) a-t-il eu sur la bande dessinée francophone ? Des microlectures d'oeuvres esquissent une histoire des interactions verbales, de Töpffer à Franquin.</p><p>À travers l'analyse de la voix et des corps en interactions, cette relecture de l'histoire d'un média pourtant dépourvu de propriétés acoustiques contribue à une histoire de la modernité sonore.</p>