Prix public : 35,50 €
« Mangeons et buvons, car après la mort il n'y a plus de plaisir! » Lorsque l'on fait effort pour retrouver explicitement ce curieux conseil non seulement chez saint Paul, mais aussi bien dans la Sagesse ou dans le livre d'Isaïe, on constate que cette parole attribuée par les Écritures aux impies figure également chez Hérodote et Montaigne, quand ceux-ci rapportent que les Égyptiens plaçaient dans les banquets l'effigie d'un mort en bout de table; qu'elle se retrouve dans des contextes fort disparates chez Athénée de Naucratis, chez Ronsard, puis chez le libertin Des Barreaux, chez Léon Chestov et, bien avant lui, chez des Pères tels que Pierre Chrysologue; puis on la rencontre encore et encore, ici sous la plume de Schopenhauer, et là dans un texte de Renan ou de Feuerbach. On remarque, chemin faisant, à quel point le matérialisme philosophique ne tend pas spontanément vers la sereine ataraxie d'Épicure. On découvre ou l'on redécouvre qu'une tradition anacréontique, celle d'Omar Khayyam, celle du faux épicurisme des poètes de la Pléiade, celle des voluptueux inquiets, a tout autant voix au chapitre lorsqu'il s'agit de méditer en athée sur les mobiles de l'agir humain ou sur la possibilité d'être heureux. « Tant la religion a pu conseiller de crimes ! » . « La vie entière du philosophe est une préparation à la mort ». « Qui sait si vivre n'est pas mourir, et si mourir n'est pas vivre? ». « Il y a une seule chose dont Dieu même est privé, c'est de faire que ce qui a été fait ne l'ait pas été ». En étudiant les usages extrêmement divers que de telles formules ont pu connaître en histoire des idées, Jean Salem retrouve ici quelques questions philosophiques essentielles, – qui ont trait à la sagesse, au plaisir, à la mort.