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V, reste le rire
comme visage de la mère.
Celui de Déméter. Image joyeuse après le désespoir et l’enlèvement de la fille très aimée.
Déméter : redoutable déesse.
Rire : la vieille Baubô soigne les bobos.
Comment ?
En soulevant à deux mains sa jupe, large jupe fendue qui lui permet de pisser debout. Et d’exhiber gaiement sa fente et le flot doré qui en gicle.
Déméter est une mère de dignité. Baubô, une tenancière de gargote qui n’a guère froid aux yeux. On la dit un peu sorcière, un peu maquerelle. Son fils (ou son neveu) est toujours à ses côtés. Un enfant bouffon comme un petit singe et qui aime à se glisser souvent sous la vaste jupe fendue.
Pisser devant une déesse-mère comme celle-là n’a qu’un but. Mis à part une impérieuse nécessité physique ou l’envie de choquer les bonnes manières de la voyageuse divine.
Déclencher un énorme rire.
Qui tarde à venir.
Ce n’est pas pisser qu’il lui faut, à cette grande mère blanche et triste, mais boire.
Tout le ventre de Baubô n’est qu’un visage hilare où la fente du sexe redouble la bouche dessinée tout en bas.
Et la mère désespérée ne résiste pas au spectacle grotesque que lui offre la gargotière ni au verre d’eau fraîche qu’elle lui tend. Le tableau existe (Adam Elsheimer). Mais il cache l’essentiel : le visage dessiné sur le ventre. Magritte s’en est souvenu. Déméter rit de manière démesurée comme seuls les dieux peuvent rire. De sa bouche ruisselle l’eau qu’elle boit, coulant sur son menton. Tout son corps est secoué. Le tissu drapé a glissé, dévoilant une poitrine de reine épuisée. La sueur goutte à son front et elle continue à rire.
Alors le petit singe humain à son tour éclate : devant l’avidité du rire de la déesse si digne encore il y a quelques instants et maintenant, en proie à une hilarité énorme, à son tour il rit sans retenue.