Prix public : 18,00 €
Le sujet central de l’œuvre de Genet, ce n’est ni le mal, ni la sainteté, la poli-tique ou l’homosexualité mais la mort. Être mort, parler par-delà le monde des morts, donner la parole aux morts. Genet est un janséniste qui se place du côté de ceux à qui la grâce fut refusée dès la naissance. Sans salut dans l’au-delà, ces hommes sont dès le premier jour de leur vie des cadavres errants et abjects, des non-êtres sans avenir. Genet est scandaleusement métaphysique par cette première affirmation – être impardonnable, c’est être mort – puis par sa volonté d’accorder sa grâce à ces bannis. Pour cela, il crée une langue qui tresse le champ lexical de la poésie à ceux du catholicisme et de l’interlope : elle mêle la rose et la Vierge au meurtre et à la merde. À travers ce jeu formel, où le bien et le mal s’équivalent, hyperboles et métaphores s’efforcent de faire sens afin d’offrir un verbe qui réaffirme le droit à la parole, le pouvoir du locuteur, mais aussi de l’interlocuteur : être entendu est un préalable à tout pardon. Cette langue est donc opératoire : sa force poétique permet de nommer les morts, de les inscrire dans une famille et à nous, lecteurs, de porter leur deuil.