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La Shoah a été perpétrée sur le sol germanique ou germanisé de force, et les assassins parlaient le plus souvent l'allemand. Jusqu'au procès Eichmann à Jérusalem, en Israël (1961) et aux procès d'Auschwitz à Francfort (1963) et Leipzig (1965), le silence a dominé en Allemagne et surtout en Autriche en dépit d'ouvrages d'historiens (Eugen Kogon) et de philosophes (Karl Jaspers), et de quelques rares tentatives littéraires alors peu perçues. L'Allemagne est divisée, et même si chaque Etat à sa propre politique vis-à-vis du passé, les deux évitent soigneusement de s'interroger sur le génocide des Juifs. Primo Levi n'est traduit qu'en 1959, douze ans après la parution de Si c'est un homme (Se questo è un uomo ?). Les auteurs allemands qui mettent la Shoah au coeur de leur oeuvre vivent à l'étranger, Paul Celan en France, Nelly sachs en Suède et plus tard en Suisse, Ingeborg Bachmann à Rome. Pour la nouvelle génération dont fait partie W.G. Sebald (né en 1944), la Shoah demeure en RFA, jusque dans les années 1960, "un immense domaine tabou". L'Autriche, elle, façonne son image "dans la perspective des criminels qui se font passer pour des victimes". C'est très lentement que la shoah prend place dans des oeuvres littéraires, essentiellement théâtrales (Peter Weiss ou Rolf Hochhut). Puis, avec les écrivains qui publient à partir des années 1990, s'impose la question de la fiction constamment menacée par la tentation du Kitsch und Tod tôt dénoncée par Saul Friedländer. Sans être exhaustif, ce numéro de la Revue d'Histoire de la Shoah cherche à couvrir plusieurs générations d'auteur(e)s d'expression allemande à travers tous les genres (poésie, théâtre, roman, journal intime, littérature de jeunesse, voire formes littéraires expérimentales) et à partir de figures connues et moins connues, de Bachmann à Celan, de Grass à Sebald.