Prix public : 32,00 €
Représenter signifie d’une manière très large, rendre présent ce qui n’est pas directement accessible. Mais l’action de représenter n’est jamais neutre, et la représentation, entendue comme résultat de cette action, est toujours différente de l’objet représenté, car cette action implique l’intervention d’un sujet, qui est lui-même soumis à des représentations mentales tout autant qu’il en produit, par le simple fait de son intervention.Si la règle de droit n’a certes pas pour objet de constituer une représentation du monde « objectif » sur lequel elle opère, et dont elle fait néanmoins partie, le discours des juristes consiste en une représentation du droit (ou du discours des autres juristes), nécessairement dépourvue d’objectivité : quand bien même elle se voudrait purement descriptive, elle n’en serait pas moins le fruit de certaines représentations mentales auxquelles est soumis l’auteur du discours, qui, du fait même de sa culture est l’héritier des images forgées par ceux qui l’ont précédé, qu’ils soient ou non des juristes. Et ces représentations sont d’autant plus redoutables qu’elles sont souterraines : de ce fait, elles sont transmises de génération en génération sans même qu’elles affleurent à la conscience de ceux qui les véhiculent au moyen de figures, de schémas, d’expressions qui asservissent la pensée, une pensée qui croit souvent s’attacher à l’objet représenté, mais qui n’observe que l’un de ses représentants, tant et si bien que ce sont parfois les représentants qui finissent par produire de la « réalité »…Jeux de miroirs, mises en abyme, les représentations ne cessent de dérouter l’esprit, et l’observation de ces phénomènes est passionnante.Cet essai se donne pour objectif de mettre à jour certaines de ces représentations mentales dont le caractère cryptique assoit la puissance. Il ne saurait prétendre toutes les déceler, d’autant que l’auteur de ces lignes est sans aucun doute lui-même soumis à ses propres limites. Le but de cet ouvrage est simplement d’observer la démarche intellectuelle des juristes, dont l’étude est au moins aussi importante que celle du droit lui-même, et d’initier un mouvement, une observation critique qui se sait conditionnée par un certain point de vue parmi bien d’autres possibles.