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Romano Guardini (1885-1968) est un poète de la nuit, mais ce qu'il dit de la nuit nous fait rêver d'aurore et nous la rend à nouveau possible. Le chrétien qu'il est encore sous nos yeux ne peut pas ne pas répondre de l'espérance qui demeure en nous ni nous cacher la hantise propre à notre pérégrination personnelle, pour penser Dieu en sa révélation et en sa création, pour entendre les deux paroles issues d'un même amour. A-t-on encore le loisir de perdre son temps au chevet de chaires fondées en des temps où l'on croyait possible un savoir universel ? Faut-il encore s'user à comprendre un Occident toujours plus confus, qui, après avoir pompeusement proclamé son évidence en sa modernité, en nie aujourd'hui le sens en sa postmodernité ? C'est un fragile espoir que l'être oppose au néant. Guardini nous livre sa pédagogie du divin sous la forme d'une écriture héroïque plutôt que moralisante, d'un témoignage plutôt que d'une leçon. Au long de ses écrits, on visite un chrétien, devise avec un disciple plus qu'avec un maître, un homme qui a pris Dieu et l'homme au sérieux, ne les dissociant jamais du fait de leur relation, mais les embrassant dans le même regard. Son anthropologie n'est pas séparée de sa théologie, bien qu'à aucun moment on ne sente entre elles la moindre confusion ou oppression, la moindre diminution ou hypertrophie. L'homme y apparaît pleinement homme, Dieu y est traité en souverain et en créateur. C'est cela, « L'esprit du christianisme », pour Romano Guardini. Et c'est à recouvrer l'unité profonde de la foi et de la culture, dont l'apothéose est dans la liturgie, que ce livre nous invite, à l'école d'un des maîtres de Benoît XVI.