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« Le spectateur idéal, pour moi, regarde un film comme un voyageur le paysage qu'il traverse en train. ». « Les images que nous créons n'ont pas d'autres significations que d'être ce qu'elles sont. ». On doit ces propos au cinéaste russe Andreï Tarkovski. Si les films de Tarkovski ont suscité beaucoup d'interprétations, ses injonctions aux spectateurs ont rarement été prises au sérieux par ses commentateurs. Et pourtant, cette conception du cinéma mériterait qu'on s'y attarde, et qu'on tente de la penser dans toute sa radicalité : peut-on réellement poser sur les images d'un film un regard entièrement vierge de ce que Tarkovski appelle « les interférences de la pensée » ? La forme cinématographique semble naturellement pourvoyeuse de sens : le cinéma, dans son essence même, ne condamne-t-il pas un tel projet à l'échec ? Cet ouvrage se propose de développer cette conception du cinéma en s'appuyant sur les films de trois cinéastes qui ont tenté de faire accéder leur spectateur à ce regard détaché : Andreï Tarkovski, Alexandre Sokourov et Gus Van Sant.