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Ceux que Le Soulier de satin ou les Cinq Grandes Odes intimident (et fascinent, d’ailleurs, petits qu’ils se sentent devant leur immensité) sont surpris, quand ils ouvrent les Phrases pour éventails, de découvrir ce Claudel capable de parler si simple et si ténu. Où il avait besoin de tout le dictionnaire, et de toute la Bible, et d’Homère, de Virgile, de Dante, quelques mots ici lui suffisent. L’étonnant est qu’il n’y soit pas moins cosmique et que sur ces ailes de papier il puisse inscrire, en quelque sorte, l’univers entier.Pour dire la surprise du sage (ou de l’enfant : c’est la même chose) devant ce monde beau à couper souffle et mouvement, ce monde à l’étoffe inusable, pour compter les pas du marcheur et approcher l’énigme de la rose, pour évoquer l’ubiquité du ruisseau et l’ombre double de la feuille et même pour avouer, du bout des lèvres, une douleur à jamais imprononçable, le musicien doit à son tour se faire humble, rivaliser de concision – et de pudeur – avec le poète, et garder tout du long le sourire de l’enfant (ou du sage : ils se donnent la main).Je suis revenu à trois reprises aux Éventails, retenant d’abord sept, puis six, puis quatre de ces riens apparemment fragiles, en réalité si pleins de substance et plus éloquents dans leur brièveté que tant de textes bavards. Chaque cycle a son unité, sa courbe, son temps et son tempo, et je voudrais que, loin de puiser dans les trois au hasard, on veillât à garder à chacun son intégrité.Guy Sacre