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Selon certains observateurs du siècle des Lumières, la police de Paris, en dépit de ses abus et difformités, est « la plus parfaite » pour tenir une aussi grande ville d’Europe. La vaste réforme impulsée sous Colbert en 1666-1667 ne se limite pas à la création de la lieutenance générale de police. Elle inaugure une dynamique transformatrice des pouvoirs policiers parisiens tout au long du siècle suivant. Cette police, qui se veut plus préventive que répressive, développe un puissant appareil bureaucratique. Elle renforce sa surveillance sur la société et son emprise sur le territoire urbain. Soucieuse d’être utile au public en diversifiant les services qu’elle propose dans le domaine de la salubrité et de la santé, de la voirie, des arts et métiers, elle s’emploie à rassurer et à bien protéger les citoyens établis, mais elle moissonne sans faiblesse les « indésirables ». Si cette politique répond aux attentes sécuritaires de certaines franges de la population, elle nourrit aussi constamment les tensions. Les résistances ne cessent jamais, car la police, qui se pique d’être juste, l’est rarement dans une société marquée par une forte inégalité sociale. La cristallisation des critiques autour du despotisme de la police est donc un ingrédient dans l’effervescence pré-révolutionnaire. A partir des années 1760, la philosophie du droit naturel, une nouvelle idée de la liberté et de la souveraineté politique rendent l’arbitraire policier de moins en moins acceptable. Ces critiques rencontrent le vécu ordinaire de tous ceux qui ont la vie fragile et qui savent la police souvent dure aux pauvres. En 1789, la dénonciation du despotisme de cette police, qui a voulu se mêler de tout, tout connaître, tout prévoir, érige les services de la lieutenance générale en emblème de la tyrannie. Une Bastille à abattre pour que triomphent enfin l’état de Droit et l’égalité de tous devant la Loi.