Prix public : 45,00 €
<p>Toute oeuvre véritable naît d'une vision. Un matériau la réalise.
Chez Etienne, l'oeuvre ne réside pas simplement dans le bois, la pierre, le bronze, elle s'accomplit dans l'espace découpé. Dieu sait qu'il use de ce droit d'évoquer !
Mais qui se plaindrait en contemplant son travail qu'il manque ici un pied, un sein, une tête ? Devant sa sculpture, l'imaginaire de chacun est requis, convoqué avec une telle force qu'un pied de plus serait de trop, il y a le compte, merci !
L'artiste est si confiant en l'Invisible qu'il s'appuie sur l'air pour faire naître son objet. Quelle audace ! Pourtant, en se confiant au vide, est-ce qu'il risque la chute ? Non, car il n'y a pas de vide. C'est comme si l'oeuvre existait déjà quelque part, cachée à nos yeux et que ses mains nous la découvraient peu à peu, se gardant de la révéler tout entière. Ici, suggérer procède à la fois d'une science et d'une foi. Quelque essentiel que soit le sujet, on n'en dit rien si l'on en dit trop.
Ces noces toujours renouvelées de l'air et de la matière nous convainquent que sa sculpture n'est pas un meuble qui prend place dans une demeure, sur un parvis, au milieu d'une fontaine, mais une conquête de l'espace et à ce titre une invitation à s'élever, une proposition pour le regard à percevoir au-delà du regard.
Emergeant d'une autre dimension au bord de laquelle elle se tient, l'oeuvre permet au coeur de celui qui regarde d'aller son chemin hors de vue. Est-ce que ce qui ne se voit pas n'existe pas ? semble-t-elle dire. L'oeuvre d'Etienne s'impose justement parce qu'elle unit avec la matière ces forces qui nous gouvernent mystérieusement ; parce qu'elle marie le visible et l'invisible dans une harmonie - au fond bien naturelle - qui retient le passant de passer.
Isabelle Pirot</p>