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Avec Lanterne magique, Jérôme Prieur nous propose une réflexion sur l’émergence, en plein siècle des Lumières, d’une pratique dont les ressorts occultes sont pourtant essentiels, celle des projections publiques de lanterne magique qui débutent durant l’An VI, c’est-à-dire en 1797-1798. L’auteur construit son essai sur l’archéologie de l’image lumineuse à partir de deux livres, Du côté de chez Swann de Marcel Proust et les Mémoires d’Étienne-Gaspard Robertson (1763-1837), l’inventeur de la fantasmagorie qui fit carrière sous le Directoire et le Consulat quand les lanternes magiques sont connues depuis la fin du XVIIe siècle. Si l’on connaît bien le premier, la fameuse série de six plaques de lanterne magique racontant l’Histoire de Geneviève de Brabant et le fameux passage (« On avait bien inventé, pour me distraire les soirs où on me trouvait l’air trop malheureux, de me donner une lanterne magique, dont, en attendant l’heure du diner, on coiffait ma lampe ; et, à l’instar des premiers architectes et maîtres verriers de l’âge gothique, elle substituait à l’opacité des murs d’impalpables irisations, de surnaturelles apparitions multicolores, où des légendes étaient dépeintes comme dans un vitrail vacillant et momentané »), on connaît moins ou pas du tout le second et ses Mémoires récréatifs, scientifiques et anecdotiques d’un physicien aéronaute. En plein siècle des Lumières, Étienne-Gaspard Robertson (peintre, dessinateur, physicien aéronaute, mécanicien, fantasmagorien et mémorialiste) est un véritable illusionniste. Comme l’écrit Jérôme Prieur dans sa préface, Robertson propose «de l’intérieur, une réflexion sur le spectacle lumineux, sur l’illusion et la croyance, une réflexion sur le spectateur – ce hors champ laissée dans l’ombre des histoires du cinéma et du pré-cinéma, cette part d’ombre consubstantielle aux images nocturnes. Bien avant le grand Hitchcock, Étienne-Gaspard Robertson a été le premier à comprendre que les spectacles optiques que préfigure sa fantasmagorie ne devaient pas se contenter de mettre en mouvement les images, mais qu’ils devaient mettre en scène les désirs et les peurs que suscitent les images, qu’ils devaient diriger le spectateur, notre double assis à notre place dans la nuit lumineuse. Est-ce vraiment un hasard si son écran de projection, Robertson l’appelait «miroir»? > Jérôme Prieur est né le 29 janvier 1951 à Paris. Il est cinéaste et écrivain. Écrivain, il est l’auteur de plus d’une vingtaine de livres dont Proust fantôme (Le cabinet des lettrés/Gallimard, 2001), Le Roman noir, essai sur la littérature gothique (La Librairie du XXIe siècle/Seuil, 2006, Berlin, Les Jeux de 36 (La Bibliothèque, 2017). Cinéaste, il a tourné une cinquantaine de films dont, avec Gérard Mordillat, Corpus Christi (1998), L’Origine du christianisme (2003), L’Apocalypse (2008)) ; et Léon-Paul Fargue, souvenirs d’un fantôme (1996), Jean Paulhan, le don d’ubiquité (1998) René Char, nom de guerre, Alexandre (2006), Hélène Berr, une jeune fille dans Paris occupé (d’après le Journal d’Hélène Berr (1942-1944). Ce livre a paru une première fois en 1985 dans la collection Le Chemin chez Gallimard. Cette réédition d’un livre épuisé est augmentée d’une préface, «Après-coup».