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«A son retour, il se comporta comme s’il avait toujours été présent à la Thébaïde et reprit ses occupations : préparer les équipes qui bientôt partiraient dans les camps pour un travail de formation. Les «équipes volantes» — ainsi s’appelaient nos groupes — devaient se rendre dans les maquis dissimulés à travers les pentes du Vercors.»«La guerre avait tué Charles Péguy, animateur des universités populaires du début du siècle, sur un champ de bataille. Nous allions essayer une fois encore de partager la culture; plus que toute autre chose peut-être, elle nous séparait.»«Le camp apparut. C’étaient, dissimulées dans la forêt, mais bien abritées derrière un gros rocher, deux cabanes en rondins de sapins; des branches entrelacées formaient les murs. Le toit était recouvert de paille. Elles s’intégraient au paysage, dont elles gardaient la couleur. La fumée d’une cuisine se perdait dans la forêt. Une vache dépecée pendait entre deux arbres. Derrière le rocher, une lessive bouillait sur trois pierres.Nous étions dans le premier camp du Vercors.»«Nous nous préparions pour d’étranges combats. Ces textes, résultats de nos recherches, de nos nuits de veille, de nos discussions fraternelles, ces textes arrachés aux rayons morts de la bibliothèque, pris dans des livres froids et inertes, ici, dans cette clairière, ressuscitaient au milieu de la nuit. Chaque mot, chaque phrase, chaque poème touchait le coeur de ceux qui, privés de tout, étaient rassemblés là auprès de ces braises, et leur offrait en partage la joie intérieure de l’espoir.»«Là, dans cette clairière du Vercors, me fut révélée l’incantation des mots, la puissance du verbe. Lire, c’était préparer le long cheminement de la modification. Nous devions continuer cet enrichissement. Je ne savais rien de ce que l’avenir nous préparait. J’y rêvais.»