Prix public : 22,00 €
Sous la lumière du réverbère, mon bouleau frissonne dans la nuit, ses feuilles d’or tremblent en attendant le premier balbutiement sonore du merle annonciateur du jour. J’ai posé l’encrier au bord de ma table de nuit et glissé la plume entre les pages, soufflé la bougie, et me suis rendormie.Je rêve à un rosier rouge, très vigoureux que je veux déterrer. Je pioche avec ma pelle autour de la tige épaisse, je découvre les racines. Elles plongent dans un magma sanguinolent.C’est la cervelle de Baudelaire. Ma pelle entame la cervelle de Baudelaire qui est gluante et élastique et cette matière me révulse, je referme le trou en espérant que je n’ai pas abimé le rosier. Je montre à mon amant, qui se penche avec moi et regarde le rosier, de belles pousses qui s’élèvent comme des cornes d’ivoire autour de la tige centrale (mon amant me récite souvent des poèmes de Baudelaire, si je suis angoissée, il me récite Le balcon).J’écris maintenant mes années d’éditrice de poésie, la richesse de ces années-là, et le prix à payer, c’est d’avoir dû cesser d’écrire moi-même pendant toutes ces dernières années ; la poésie et les poètes m’ont complètement accaparée.J’ai écrit et reçu des milliers de lettres (échanges avec Pierre Garnier, avec Pierre Dhainaut, avec Louis François Delisse, avec François Huglo, avec Bernard Noël.